Intervention de Nicolas Thierry en séance plénière du 2 juillet 2021

Monsieur le Président, chers collègues,

 

Tout d’abord, Monsieur le Président, veuillez recevoir, de la part de notre groupe, nos félicitations républicaines pour votre ré-élection.

 

Les élections régionales ont été marquées par une abstention historique. La crise sanitaire et le contexte inédit, dans lequel s’est déroulée cette campagne, ont eu très probablement un effet sur la démobilisation des citoyennes et des citoyens. Mais s’arrêter à cette seule analyse serait une erreur.

Cette abstention est un silence glaçant, lourd de promesses déçues, de déceptions tues, d’humiliations mal ravalées, de peurs et de colères mêlées. Cette abstention historique est politique. Elle traduit une profonde crise politique et démocratique.

Les citoyens s’intéressent à la politique mais n’écoutent plus les politiques.

 

Le dialogue est rompu.

 

Au-delà de nos sensibilités politiques, nous devons toutes et tous, sans exception, nous remettre en question et trouver les moyens de régénérer le lien, la confiance avec les Français et en ce qui nous concerne les Néo-Aquitains.

 

Plus de deux tiers des électeurs ne se sont pas déplacés aux urnes, la légitimité qui est la nôtre dans cet hémicycle est donc forcément fragilisée. L’humilité devra donc habiter chacun de nos pas. Nous sommes des élus mal élus, enfant d’une crise démocratique qui n’en finit pas de s’approfondir.

 

Cette crise démocratique intervient par ailleurs à un moment où nous entrons dans la décennie critique, c’est ainsi que la qualifie la communauté scientifique. L’emballement climatique, l’effondrement du vivant, la perturbation des grands cycles naturels sont en dangers, et ce qui se joue aujourd’hui n’est rien de moins que préserver les conditions qui rendent notre planète habitable.

 

L’actualité, ce qui se passe actuellement au Canada par exemple, et c’est un exemple parmi tant d’autres, où l’on voit le pays suffoquer sous un dôme de chaleur à près de 50 degrés, est une parfaite illustration des phénomènes extrêmes qui vont se multiplier si nous ne dévions pas le cours des choses.

 

Vous avez parlé Monsieur le Président, durant cette campagne, de manière fort peu honnête, d’écologie de la brutalité. Ce sont les faits qui sont brutaux. L’heure n’est plus au déni, l’heure n’est plus aux paroles vides, le temps des actes est venu.

 

C’est dans la décennie qui est devant nous, et donc durant ce mandat qui se terminera en 2028, que les choses vont se jouer. C’est l’heure de la lucidité et du courage. Nous entrons dans la dernière fenêtre politique pour agir si nous voulons éviter de dépasser des seuils d’irréversibilité.

 

Les crises écologiques, sociales, économiques et sanitaires se conjuguent et sont en réalité la conséquence d’une même cécité : les maux que nous vivons viennent en bonne part de notre incapacité à accepter que nous  vivons dans un monde, et des territoires, aux ressources limitées. Un principe de modération devrait guider nos pas. Le fait de ne pas l’intégrer dans nos politiques publiques, et dans notre manière d’habiter la planète, nous enferme dans une fuite en avant qui accélère la crise écologique et creuse les inégalités.

 

Notre rôle est donc d’apporter des réponses politiques qui n’opposent plus les crises aux crises. Le pire serait d’opposer les malheurs d’aujourd’hui aux désastres de demain. La seule voie possible pour répondre aux défis qui sont devant nous est de mener la transition écologique dans la justice sociale.

 

Soyez assurés que notre groupe sera toujours au rendez-vous pour soutenir les politiques publiques qui sauront articuler ces deux grands enjeux, absolument indissociables.

 

Néanmoins, ne comptez pas sur nous pour cautionner des politiques de petits pas, des politiques de simples ajustements, d’amélioration à la marge. Au regard de la situation que nous vivons, se tromper de niveau d’ambition, ou dans l’intensité de la réponse à apporter, serait aussi une faute politique et morale.

 

Je ne vous cache pas que nous débutons ce mandat avec beaucoup d’inquiétudes car il va falloir que vous fassiez ce que vous n’avez jamais fait. En effet, au-delà de fixer des objectifs, ceux de NéoTerra, l’enjeu est maintenant de transformer toutes les politiques publiques de la Région afin que celles-ci soient, d’une part, compatible avec la lutte contre l’emballement climatique et la préservation du vivant, et d’autre part qu’elles soient au bon niveau d’ambition.

 

Depuis le vote de la feuille de route NéoTerra, lors du mandat précédent, extrêmement peu de politiques ont été revisitées ou réorientées. Le grand bouleversement annoncé n’a en réalité pas eu lieu dans la machine régionale, dans la fabrique des politiques publiques.

 

Monsieur le Président, je le redis, en tant que Président de la plus grande Région de France, de la première région agricole d’Europe, une immense responsabilité, peut-être même écrasante, vous incombe. Ce mandat doit être celui du courage. Si vous échouez les conséquences seront telles que l’histoire ne retiendra que cela de votre passage à la tête de notre région.

 

Soyez à la hauteur et nous serons à vos côtés, si vous choisissez  l’immobilisme ou le recul, nous n’aurons d’autre choix de que nous mettre en travers de votre route.