LGV et artificialisation des sols : le compte n’est (toujours) pas bon

Les LGV du Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO) figurent dans la liste des « projets d’envergure nationale ou européenne et d’intérêt général majeur » qui ne seront pas dans les quotas de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers que la loi Climat et résilience de 2021 entend freiner. Mais les chiffres d’artificialisation avancés pour ce projet par l’État, soit 740 hectares, ne représentent que 15% des 4800 hectares indiqués officiellement depuis une dizaine d’années. Inquiet, le groupe des élu·es écologistes de la Région a sollicité le préfet par courrier pour lui demander des précisions sur le mode de calcul.

Conseiller régional écologiste, Karfa Diallo en a également été la cible. Les élu·es écologistes appellent l’État à prendre les mesures nécessaires pour enrayer ces actes racistes et anti-démocratiques. 

 

Sans réponse à ce jour. La sous-estimation des surfaces prévues par l’État risque fort d’impacter les futurs « droits à artificialiser » des territoires traversés, la Région et les collectivités locales se retrouvant, à terme, contraintes d’intégrer les surfaces artificialisées par le GPSO dans leur quota. À moins que le gouvernement ne soit prêt à abandonner toute ambition de préservation des terres agricoles et naturelles… Le jeu de dupes continue sur ce projet destructeur, onéreux et inutile. Une consultation publique sur l’ensemble des projets retenus par l’État, dont le GPSO, est en cours jusqu’au 2 mai. (1)

Pour protéger les terres agricoles, et lutter contre le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité, les territoires doivent réduire leur consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers afin d’atteindre le « zéro artificialisation nette » (ZAN) en 2050. C’est du moins ce que prévoit la loi Climat et résilience de 2021. Toutefois, certains projets « d’envergure nationale ou européenne et d’intérêt général majeur » seront exemptés de la comptabilisation des terres artificialisées. Ce mois-ci, le ministère de la Transition écologique a publié le projet d’arrêté fixant la liste1 des 450 projets de ce type pour la période allant jusqu’en 2031. Y figure, entre autres, le Grand projet ferroviaire du Sud-Ouest (GPSO), qui concerne la construction de deux nouvelles lignes à grande vitesse entre Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax.

 

Les chiffres avancés par l’État en termes de consommation d’espaces naturels, agricoles ou forestiers pour la Nouvelle-Aquitaine et l’Occitanie ne correspondent pas à ceux indiqués, notamment, sur le site officiel GPSO.(2)

« Nous ne comprenons vraiment pas les chiffres présentés par l’État : ils ne correspondent ni à la surface impactée par le projet énoncée officiellement depuis près de 10 ans. Pour rappel, l’emprise du projet est de 4 800 ha, dont 3 100 hectares pour Bordeaux-Toulouse, et dans l'arrêté, la surface retenue pour Bordeaux-Toulouse n’est que de 740 ha ! Quant à la ligne Bordeaux-Dax, elle n’apparaît même pas... »

« Nous ne comprenons vraiment pas les chiffres présentés par l’État : ils ne correspondent ni à la surface impactée par le projet énoncée officiellement depuis près de 10 ans, ni à la définition de « surface artificialisée » définie par le décret de novembre 2023(3). Pour rappel, l’emprise du projet est de 4 800 ha, dont 3100 hectares pour Bordeaux-Toulouse, et dans
l’arrêté, la surface retenue pour Bordeaux-Toulouse n’est que de 740 ha ! Quant à la ligne Bordeaux-Dax, elle n’apparaît même pas… Le ministère de la Transition écologique précise lui-même que les surfaces végétalisées aux abords des rails ne seront pas dans le quota de l’État, souligne Christine Seguinau, conseillère régionale membre de la commission transports et coprésidente du groupe écologiste. Pourtant le décret de 2023 définit comme artificialisées les «surfaces végétalisées herbacées» à usage d’infrastructures notamment de transport ou de logistique. Cela pose de vraies questions en termes de conformité du décompte proposé par l’État et, au-delà, de ses conséquences pour nos territoires. Après avoir déjà subi une taxe additionnelle sur le foncier et les taxes de séjour, pour des trains qui ne feront que passer à une heure de leur mairie, les collectivités locales risquent de devoir assumer l’artificialisation du GPSO ».

« Ce projet, s’il se fait, va artificialiser des espaces naturels, des forêts, des terres agricoles, non seulement pour la création des nouvelles lignes mais également pour toutes les gares nouvelles, etc. Toutes les collectivités de Nouvelle-Aquitaine impactées sont en droit de savoir combien va leur coûter ce projet et comment la différence constatée sur son emprise foncière va impacter leur capacité à créer, par exemple, des logements, des pistes cyclables, ou des services publics nécessaires aux habitant·es.»

« Nous exigeons des clarifications avant la fin de la consultation publique nationale, le 2 mai, ajoute Émilie Sarrazin, conseillère régionale et membre de la conférence « ZAN » de la Région Nouvelle-Aquitaine. Ce projet, s’il se fait, va artificialiser des espaces naturels, des forêts, des terres agricoles, non seulement pour la création des nouvelles lignes et les aménagements ferroviaires au Sud de Bordeaux (AFSB) et au Nord de Toulouse (AFNT), mais également pour toutes les gares nouvelles, tous les accès et aménagements routiers, etc. Toutes les collectivités de Nouvelle-Aquitaine impactées sont en droit de savoir combien va leur coûter ce projet et comment la différence constatée sur son emprise foncière va impacter leur capacité à créer, par exemple, des logements, des pistes cyclables, ou des services publics nécessaires aux habitant·es. Nous avons demandé au préfet tous les détails : quel sera le décompte de l’artificialisation à cause du projet GPSO pour chaque commune d’ici 2031 ? Et d’ici 2041 ? Par qui cela sera-t-il assumé tout en respectant la loi : l’État, la Région ou les communes ? À moins que le gouvernement ne prépare déjà le renoncement aux ambitions de la loi de 2021, avec les conséquences qu’on connaît sur la disparition des terres agricoles et des réservoirs de biodiversité ? »

Le groupe écologiste, solidaire et citoyen reste mobilisé contre ce projet destructeur, onéreux et inutile. Il était notamment présent le samedi 20 avril à la mobilisation organisée par plusieurs collectifs à la gare SNCF de Cadaujac. Il le sera à nouveau lors du grand convoi « La Sarabande » contre les LGV du Sud-Ouest courant mai.

  1. Projet d’arrêté relatif à la mutualisation nationale de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers
    des projets d’envergure nationale ou européenne d’intérêt général majeur | Consultations publiques
    (developpement-durable.gouv.fr)
  2. https://www.gpso.fr/sites/gpso.fr/files/2023-10/biodiversite_GPSO_3677.pdf
  3. Le décret du 27 novembre 2023 relatif à l’évaluation et au suivi de l’artificialisation des sols définit comme
    artificialisées :
    ● « les surfaces dont les sols sont soit imperméabilisés en raison du bâti ou d’un revêtement, soit stabilisés
    et compactés, soit constitués de matériaux composites sont qualifiées de surfaces artificialisées »,
    ● « les surfaces végétalisées herbacées et qui sont à usage résidentiel, de production secondaire ou
    tertiaire, ou d’infrastructures notamment de transport ou de logistique, dont les sols sont couverts par
    une végétation herbacée. »