Lettre ouverte, Thierry Perreau | Ferme-usine aux 1200 taurillons

La Nouvelle République du 19 mai 2022 : Ferme des 1.200 taurillons : le tribunal administratif de Poitiers s’estime incompétent (lanouvellerepublique.fr) 

« Le tribunal administratif de Poitiers s’est déclaré incompétent, jeudi 19 mai 2022, à étudier deux recours, déposés par l’association Aspect et la commune de Coussay-les-Bois, contre des permis de construire de la Ferme des 1 200 taurillons « .

 A l’entrée du parc de Blossac, qui voisine avec le Tribunal Administratif, la caravane rebelle brille sous le chaud soleil. Je prends la parole en tant qu’élu régional EELV comme le font, depuis 2015  les élus écologistes de la Vienne : Véronique Massonneau, Léonore Moncond’huy, Christine Graval… Nous le faisons pour dénoncer l’incohérence d’un tel projet alors que toutes les connaissances scientifiques en démontrent la nocivité.

Il s’agit d’élever, dans un système concentrationnaire, des taurillons destinés à l’engraissage. Ce mode d’élevage est la certitude de souffrance pour les animaux et la démonstration d’un mépris profond pour le vivant. Ce projet est aussi l’accaparement d’un bien commun essentiel à toute vie, l’eau. A Coussay-les-Bois, on boit une eau de parfaite qualité, ne subissant aucun traitement, c’est une situation rarissime. On peut affirmer sans grand risque d’être démenti que, si le projet de cet élevage aboutissait, cela en serait fini de cette situation exceptionnelle. Alors peut-être faudra-t-il créer, avec force subventions publiques, une usine de traitement des eaux, pour « laver » l’eau polluée par les effluents de cette usine à viande ?

Ces atteintes au vivant, aux bien communs, comme l’eau ou l’air ne sont plus admissibles, qu’il faille des années de combat de la part, des militants et des élus pour freiner, sinon empêcher ces projets mortifères n’est plus acceptable.
Que ce soit les taurillons ou les bassines, il semble inévitable que la captation des biens communs au profit de minorités économiques conduise à des oppositions qui se durciront. Seul le profit de court terme peut expliquer de tels comportements d’accaparement et les lois ne sont plus adaptées à garantir nos besoins vitaux.

Le dérèglement climatique, la dégradation de notre environnement, la disparition des espèces, le gaspillage des ressources, demandent un encadrement législatif nouveau, qui prenne en compte l’accélération, l’urgence des conditions à réunir de notre vie, de notre survie sur Terre. Si changer les lois qui nous réunissent est un chantier à conduire avec précaution, il est certainement plus facile de fixer des conditionnalités, des objectifs de développement durables aux projets économiques. En tous cas il faut s’affranchir du versement d’un seul euro d’argent public quand de tels projets transgressent l’intérêt collectif, appuyé par l’analyse des scientifiques, l’expression citoyenne et le vote des élu.es.
La centrale nucléaire de Civaux, comme d’autres, est à l’arrêt pour cause de soudures défaillantes. Cet événement avait mis de côté l’inquiétude grandissante de la ressource en eau disponible pour son refroidissement. Discute-t-on de la pertinence de cette production électrique ? Évoque-t-on la dangerosité intrinsèque d’une telle production ?
Non. La réponse en cours est le forage de deux ou trois puits à 50 m de profondeur, pour tenter de trouver l’eau qui serait nécessaire en cas de besoin de refroidissement impossible par le seul apport de la rivière Vienne.

Nous recherchons des solutions techniques aux problèmes que nous créons, quelle personne sérieuse pourrait tenir cette position longtemps?

L’eau est un bien si précieux que l’on ne peut pas lui donner un prix qui permette de la gaspiller, c’est un bien commun vital, il peut être partagé, reparti, géré, préservé, objet de toutes les attentions, il ne peut pas être le privilège de quelques-uns, ce serait à la fois une injustice et une illusion.

Nous apportons, et apporterons tout notre soutien à l’association Aspect pour son combat, ainsi qu’aux élu.es de Coussay-les-Bois en particulier pour leur résistance et pugnacité à défendre leur cadre de vie et un bien précieux à tous : l’eau.

Thierry Perreau, conseiller régional en Vienne